mes géniteurs (ils ne sont que deux ! même si je sais que quand on contemple le résultat, on a souvent l’impression qu’il a fallu s’y mettre à beaucoup), Nono et la Baronne.
Depuis quelque temps, la Baronne est fournie avec garçon de sexe masculin de fort belle stature (cet homme n’est pas taillé pour la course de fond, mais je pense qu’il aurait mis une bonne branlée aux All Blacks à lui tout seul). Vincent est ce que l’on appelle un beau-frère, un gendre, BREF : un nouveau venu.
A ce titre, il est souvent invité à se joindre à nous pour les événements familiaux de grande importance (anniversaires, mariages, baptêmes, finale de coupe du monde en tous genre*), mais ne croyez pas qu’il a gagné sa place en regardant sécher la peinture (malheureux !).
*chez moi, l’activité sportive télévisuelle est assez valorisée.
Il s’y est pris assez adroitement, le bougre : à vrai dire, je pense que Vincent est en l’espace d’un an passé maître dans l’art de sucer les boules de toute la famille d’opiner judicieusement aux propos de mon père, de complimenter ma mère sur ses boulettes, d’approuver les choix musicaux douteux de Nono et de rire de manière convaincante à mes imitations de l’accent franc-comtois (sans me vanter, dans ces moments-là mon sex-appeal est à zéro, d’ailleurs on dirait presque que j’ai grandi à Belfort).
En temps normal, Vincent fait donc un carton, mais je dois dire que ce ouikènd-là il s’est surpassé. Et pourtant, ma mère n’a pas hésité à le mettre dans une situation périlleuse en le prenant à partie dans un débat de très haute volée sur la présence esthétique ou non de trois vases, respectivement en forme de canard, perroquet et autre volaille.
Pour résumer : ma mère avait dit comme quoi elle les aimait bien, ces choses, parce que c’était sentimental (quand on emploie le mot sentimental à propos d’un objet, c’est nécessairement parce qu’il est disgracieux). Moi j’avais dit c’est moche, Nono avait mis deux doigts dans sa bouche pour mimer subtilement son dégoût et mon père n’avait pas vraiment pris la peine de donner un avis, mais son soupir en disait long sur l’estime qu’il avait pour la valeur sentimentale en question. Comme à l’accoutumé, la Baronne était d’accord avec ma mère (ces femmes forment un clan) et pour une raison que j’ignore, sa parole compte triple. Ce qui fait que l’équipe formée par Papa, Nono et moi se retrouvait à égalité avec la Baronne dans la bataille Virons la Volaille en Porcelaine.
C’est donc tout naturellement à Vincent qu’est revenu l’honneur de nous départager. Et c’est là que le gredin a fait très fort puisqu’en choisissant une formule aussi roublarde que « moi je trouve que ça va », il a d’emblée dévoilé ses qualités stratégiques en montrant qu’il avait capté qui portait la culotte dans cette maison. Et bim, il s’est rangé dans le bon camp, le camp des décideuses – tout en ménageant la susceptibilité du clan de ceux qui subissent, en nous glissant au passage que de toute façon on ne les voyait pas très bien, ces choses en porcelaine.
Mais je vous rassure tout de suite, si Vincent à l’air d’être le genre idéal parce qu’il fait du sport à gogo et qu’il refuse un deuxième verre de vin en prétextant qu’il ne peut pas se permettre de ne pas finir major au concours de chef de clinique, à côté de ça il nous raconte à Nono et moi qu’il a trop hâte d’aller se foutre la race avec ses potes samedi prochain à Berlin.
Sous sa couverture de suce-boule parental, cet homme m’a l’air normal, et à ce titre je serai heureuse de l’inviter à ma fête samedi prochain*.
La prochaine fois, je vous raconterai comment mes parents ont raté l’éducation de Nono.
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